JULIEN AMILLARD

WORKS

TXT

BIO / CV

CONTACT

Allons-nous baigner

 

 

 

 

Qui coule en premier

la rivière ou la ville ?

Ses quais jonchent la Garonne passe

les ports de la

Ciutadella

délaissant ses ombres dans ses feuilles

 

au son des tambours je m’éveillais

les verres renversées ils dansaient

bras dessus bras dessous ils dansaient

caressaient l’herbe la courbaient

jamais ne la brisaient

ils sont magnifiques n’est-ce pas

me dirait-il avant le départ, son Gaillac pour nous

séparer

 

et le train crisse

 

St Charles ronronne se prélasse

au Midi / Zuidstation

il y a des bières qui ne chantent qu’en certain lieu

la Cagole remue sa jupe comme sur ces pistes berlinoises

où la langue n’existe qu’en mélange

le miroir était couvert d'eau

et la mémoire s’échappait

dans les tournants de la Liffey

Ses pavés, dans leurs interstices, ses mots nous masquent

jusqu’à l’apparition d’Estève. Estève ? c’est Estève !

Salut Estève !

 

Oui oh

oui

Oui oh

Salut aussi

et son clope au bec il repartit

emportant ses volutes à ses basques

passant un pied après l’autre

se mordant un pied l’autre

comme le Rhône tourbillonne sous Lyon

glisse les accents jusqu’à

 

Je le suivais du regard, mon ombre me le dérobait

les mains dans les poches, le ciel toujours d’azur

les mouettes volètent et piquent à l’embrasure des sirènes

les éléphants jamais n’oublient, portant leur château sur leur dos

ils devancent Clerckenwell et rougissent à l’heure du thé

à l’heure où mon coude levé, la lèvre à l’embrume

la mousse entre à ma bouche

la brunâtre me dessèche

et je porte mes pas

ne pas tomber, se laisser choir

sur les marches où nos lèvres toujours s’embrassent

tes lèvres dans la cerise amère

tu me demandais si

j’ai bu aujourd’hui ?

 

Non, je suis resté

dans le bar

passant les passants qui passent

et laissent leurs mots

leurs petits bouts de vie à mes oreilles

 

Comment fait-on pour entendre

sans  voir qui parle ?

 

Les masques s’échangent comme leurs livres

leurs villes qui jamais n’existent

une louve les accueillit et leurs mains bâtirent leurs langues.

Une messe pour chacune d’entre elles aura lieu

à des heures différentes, des jours différents

il ne naîtra pas toujours le 25 ni ne mourra à 33.

Sur cette carte, regardez, il est renversé

Et sur celle-ci, un soleil pour couronne

Il ne saigne ni ne pleure

C’est un bon signe vous savez

Son bâton toujours tape sur les pavés

quelque fois s’inter

stice

bég

b

bredouille-t-il pour toujours suivre les quais

construit pour cette eau qui ne se mit à couler

qu’à l’appel des canaux

lorsque les amants gondolent

le soupir des condamnés

le soupir des condamnés

 

Arc bandé yeux

cachés sous ses ailes dressées Eros immobile

tourne

en ce cirque

tourne

quand une feuille

hira

hira

dans le silence de sa chute

 

La rivière chute

l’éléphant continue

sa marche

de château en château

traverse les villes les pavés

passant les passants

émerveillés

de voir un éléphant sans pied

offert d’une ville à une autre

et tu me demandes s’il fera beau aujourd’hui

 

Ce matin le ciel était bleu

sans nuage

mais ici, tu sais, le soleil ne dure pas

 

La rivière toujours brille

reflète les pavés et les ponts

et tu me dis que la poésie

c’est sortir de ce que nous sommes

quitter nous, où nous sommes

et flâner dans une ville sans carte

une ville où la carte toujours se noie

 

Tu sais

c’est comme ça qu’ils savaient que les mots étaient les mots

leur ville était leur ville

souvent

lorsque la lune était pleine

ils prenaient leurs livres leurs cartes

et quand la danse fut finie

l’encre se noyait

 

Diluée elle allait

jusqu’au fleuve

la mer

l’azur

 

Je connais une crique

inconnue si tu ne la connais pas

elle n’est connue que de bouche

à oreille elle remue

 

Allons nous baigner

 

 

 

 

 

 

TXT